Question de parfum…

Cette semaine, deux anecdotes à vous raconter.

La première est assez mimi.
Une maman me téléphone. Elle se présente comme étant la maman de Shanna qui vient d’entrer en 1ère primaire (CP).
Son ton est ennuyé, hésitant.
Je me dis: « Encore une qui me téléphone pour se plaindre du rythme de la classe, de la maîtresse, du fait qu’on a oublié de boutonner le manteau ou de vérifier si la boite à tartines était vide à la fin du repas… »
Je soupire intérieurement… la maman poursuit en tournant autour du pot:
– Voilàààà…. heuuuuu…. en classe elle est assise à côté d’un petit garçon qui…
Je suis repartie en imaginant que ce petit garçon doit sans doute être atroce avec elle et lui tirer les couettes à la récréation. D’ailleurs elle continue:
– Ma fille joue avec lui à la récréation et… il est gentil et ça se passe bien vous voyez…
Alors là non ! Je ne vois plus du tout !
– Mais….
Donc il y a bien un problème avec ce gamin
– Il a peut-être des problèmes de santé, c’est pas un méchant mais…
Accouche, lâche le morceau, là le suspense est à son comble !
– C’est à dire que quand ils sont en classe, ma fille est ennuyée…
Ah ! Il triche, il prend ses affaires, il lui chipe sa collation, …
– Je ne sais pas comment vous dire ça mais…
Haaa haaa  vaaas-y diiit-leeeeee
– C’est à dire qu’il ne sent pas très bon… et que ma fille est très incommodée d’être à côté de lui toute la journée.
Là, je me mords la langue pour ne pas pouffer de rire.
Je comprends très bien la petite, il m’arrive d’ouvrir grand les portes et fenêtres après le passage dans mon bureau de certaines familles. J’ai du déodorant et un psshit de parfum d’intérieur en diffusion automatique.
Je n’éprouve aucun plaisir au contact des odeurs animales de transpiration et j’abhorre le manque d’hygiène et son cortège de senteurs « Trois semaines garanties sans savon » ou « Caca fleuri de printemps » ou encore « Je mange tout le temps du salami à l’ail »

Ne vous en faites pas madame, je demanderai à Mme Cornichon de revoir la disposition de ses élèves sans incriminer personne 😀

Ma deuxième anecdote concerne une famille qui vient en direct du Maroc et désire inscrire ses deux filles de 10 et 12 ans.
En fait, ils se sont d’abord présentés dans la section secondaire pour inscrire l’aînée mais au secrétariat ils se sont fait rediriger vers moi.
L’équivalence des diplômes entre le Maroc et la Belgique correspond à une année d’écart négatif. Donc, ce qu’ils appellent la 6ème primaire par exemple correspond à une 5ème primaire chez nous au niveau des matières enseignées…
Ils ne pouvaient donc pas l’inscrire en section générale secondaire.
J’explique donc au papa (qui est le seul à comprendre un peu le français) que je vais les inscrire dans l’année qu’elles viennent de réaliser au Maroc mais que le niveau est plus élevé et que donc, elle ne vont pas refaire la même chose…
Le papa comprend bien la situation, il n’y a pas de problème, allons-y pour les formalités et ils me sort tous les papiers nécessaires aux inscriptions.
Et là… grosse crise de larmes et de colère  de la part de l’aînée.
Il n’est pas question qu’elle reste en primaire alors qu’au Maroc elle allait commencer son cursus chez les grands ! (Bon on peut comprendre sa déception bien sûr)
La cadette s’y met aussi car elle, elle était bien contente de pouvoir affronter cette nouvelle école, cette nouvelle organisation, cette nouvelle langue avec sa grande soeur et elle ne comprend pas pourquoi celle-ci veut l’abandonner alors qu’on lui offre la possibilité de rester avec elle dans la section primaire.
Et ça crie, et ça pleure, et ça se lamente… la mère s’y met… j’ai cru que j’allais avoir droit aux Youyous en prime.
Et le père dans tout ce bruit, lui, il reste stoïque et souriant.
Il me regarde et répète comme un mantra: elle ne veut pas, elle ne veut pas…
Finalement j’ai interrompu l’inscription et je leur ai dit de revenir quand ils auraient réfléchi tous ensemble à la situation. Je n’en pouvais plus.
Je les ai poussé fermement vers la sortie et je me suis dis que je ne les verrai plus.
Qu’ils allaient essayer ailleurs…
Et puis, hier, ils sont revenus tout sourire.
L’inscription a été clôturée très rapidement et les filles ont rejoint chacune leur classe. Obéissantes, charmantes, je dirais même enjouées.
En fin de matinée, Mme Mirabelle a passé la tête à la porte du bureau pour me dire que la gamine était chouette et qu’elle s’était déjà fait des copines.

Après la pluie, le beau temps….