
Le temps file, file, file… trop vite, trop de choses à faire, trop d’activités, trop plein. Et la fâcheuse tendance à freiner des quatre fers durant les deux journées du week-end.
Journées « ressource », journées « glandouille » où je guette du coin de l’oeil les minutes qui gagnent du terrain sur la nuit, petit à petit, malgré un climat gris et triste.
Pour ébrouer ma torpeur j’attends avec impatience la fin de l’hiver.
Je suis comme un ours. Je devrais hiberner.
Mais nous, les humains, on avance, un jour à la fois.
Chaque journée terminée nous rapproche du temps des nuits plus courtes.
Celles qui éloignent la noirceur et incitent à sortir le nez de la grotte.
Celles qui font admirer les étoiles et pas redouter les nuages.
Celles qui promettent au son des grenouilles et des criquets des moments de fête et de chaleur.
En attendant voici déjà janvier derrière nous et la paresse de cette période ne m’a vue qu’une seule fois devant mon clavier pour vous donner des nouvelles de l’école.
Quelques flocons ont essayé d’égayer le paysage, de l’éclaircir un moment… mais c’était pour rapidement se transformer en bouillie gelée couleur boue.
Embarras de circulation et absentéisme de conséquence.
Gérer les remplacements et encombrer les classes d’un tas de têtes blondes (ou brunes, ou rousses, ou noires) indésirables pour les collègues déjà fatigués de leurs propres élèves excités à l’idée de la future bataille de boules de neige (heu de glace boueuse)
Bref, vous avez compris que je n’apprécie pas vraiment ce moment de l’année. Et ça n’engage QUE moi car je sais que certains en apprécient le caractère rude et froid… (soupir)
Février me plait un peu plus que janvier mais moins que mars qui marque vraiment le retour de la lumière et l’espoir de quelques belles journées.
En attendant, durant ce mois glandouille de maison (pas d’école hein, pas le temps), j’ai beaucoup lu. Et pas seulement des romans pour m’évader.
J’ai notamment dévoré un tas de témoignages sur le Tda/h
Je me souviens d’une conversation entre mes parents (tous les deux enseignants) et une connaissance qui vivait l’enfer à la maison avec son petit garçon.
Je devais avoir une dizaine d’année. (Donc vers l’an 1975 du siècle dernier)
La conclusion de la conversation, dans la voiture, sur le chemin du retour vers la maison, fut que cette maman manquait de discipline et que son fils était juste un « sale gamin »… mal élevé !
En me souvenant de la description qu’elle faisait de ses difficultés et de celles de son fils, je me demande avec le recul si il ne souffrait pas déjà de tdah. Mais on n’en parlait pas à l’époque.
Peut-être est-il nécessaire que j’explique ce qu’est le tda/h:
Acronyme de Trouble De l’Attention / avec ou sans Hyperactivité
Le profil des enfants qui souffrent de tda/h ne rentre pas dans un tableau à double entrée avec des symptômes bien définis.
Il faut plutôt se représenter ça comme un patchwork de symptômes possibles pour définir le trouble. Ils peuvent se classer en trois catégories:
– INATTENTION
L‘enfant ne prête pas attention aux détails, il fait des erreurs d’étourderie quand il copie, quand il fait ses devoirs, quand il s’atèle à un travail quelconque.
Il a du mal à soutenir son attention lors d’une leçon à l’école mais aussi quand il joue à la maison (un jeu de société doit être rapide sinon il décroche).
Il semble souvent ne pas écouter même quand on lui parle personnellement, les yeux dans les yeux.
Il n’arrive pas à respecter une consigne et donc à mener à terme une tâche domestique, un devoir (et, plus tard, une obligation professionnelle).
Il a des difficultés d’organisation, son banc d’école ressemble à un champ de bataille, dans son cartable tout est entassé au détriment du soin et de la sauvegarde de son matériel, il n’a pas de structure dans ses cahiers.
Il fuit les efforts intellectuels soutenus (rêve, se balance, soupire)
Il perd/oublie TOUT: ses jouets, ses cahiers, ses lunettes…
Il réagit au moindre élément distracteur (une mouche, un élève qui fait tomber son crayon, le maître qui éternue, la chanson qui lui parvient assourdie de la classe d’à côté)
– HYPERACTIVITÉ
Il remue sans cesse sur sa chaise, se tortille les mains et les pieds
Il se lève souvent en classe ou dans d’autres situations où il devrait normalement rester assis
Il court, grimpe partout dans des situations peu adéquates pour une activité psychomotrice (chez les ados ou les adultes, ça se transforme en une grande impatience et des envies intériorisées de bouger qui peut aller jusqu’à l’inconfort dans les bras ou/et les jambes)
Il a du mal à se tenir tranquille durant des jeux ou des activités de loisir
Il agit comme si « il était monté sur ressorts »
Il parle beaucoup et souvent fort. Parfois ses phrases sont hachées, il arrive qu’il bégaie car son esprit a déjà terminé de formuler sa demande et sa bouche ne va pas assez vite pour lui.
Il ne gère pas bien sa respiration en parlant.
– IMPULSIVITÉ
Il répond à une question avant que la question n’ait terminé d’être formulée
Il a des difficultés à attendre son tour
Il interrompt les conversations
Il impose sa présence (il saute sur les genoux de sa mère lors d’une conversation entre adultes par ex)
Bien sûr, n’importe quel enfant présente à un moment ou un autre l’un des symptômes décrits ci-dessus. Ce n’est pas pour ça que c’est un enfant tda/h !
Pour que le trouble soit reconnu, il faut:
– regrouper 6 symptômes d’inattention (et 6 symptômes d’hyperactivité/impulsivité) durant au moins 6 mois consécutifs
– que ces symptômes altèrent significativement l’intégration sociale
– qu’ils soient problématiques dans deux environnements différents (école, maison, sport, travail, activités de loisir…)
– écarter tout autre dysfonctionnement du développement (trouble dissociatif, schizophrénie…)
Donc le diagnostic met parfois longtemps à être posé.
Parmi les témoignages que j’ai découvert, la majorité vit le diagnostic posé comme une libération.
Il correspond à une prise en charge, généralement médicamenteuse, qui est vécue comme un nouveau commencement.
Ce sont aussi des mots qui éclairent un mal-être. Non, ils ne sont pas fous ! Non, ils ne sont pas méchants ou bêtes. Non, il ne le font pas exprès !
Ils sont « malades » et on peut les aider… fameux soulagement.
Le petit garçon de 1975 approche maintenant les 50 balais. Je ne sais pas ce qu’il est devenu mais je peux supposer que son parcours scolaire et puis professionnel ont dû être chaotiques.
Il a fallu du temps pour re/connaître le problème.
Les acteurs de l’enseignement sont encore démunis par rapport à ces troubles qui s’accompagnent régulièrement d’un cortège de DYS.
La formation initiale ne prépare pas à la différenciation nécessaire pour ces enfants.
La société elle-même ne mesure pas l’énergie qu’il faut pour adapter son enseignement à ces nouveaux défis.
Quand j’ai commencé dans la profession, on rencontrait un élève en difficulté parmi un groupe de 20 enfants.
Maintenant, on en est à 4 à 5 par classe de 20. La courbe est exponentielle.
On ne peut plus ignorer le phénomène mais il est géré avec plus ou moins de succès selon le feeling des enseignants. Nous n’avons pas de cadre, de balises, de personnel qualifié pour entourer les enseignants dans la prise en charge et l’individualisation… C’est la débrouille et le tâtonnement
Les parents attendent de nous des miracles que beaucoup sont incapables de réaliser.
Nous sommes maladroits, mal à l’aise, démunis et parfois agressifs.
Avec la dévalorisation qui accompagne ce constat.
Et le découragement.
Il y a depuis peu quelques formations professionnelles qui tentent une mise à niveau mais elles restent essentiellement dans les constats et pas dans l’agir. Que faire avec ces enfants, comment les gérer au quotidien sans le faire au détriment des autres ? Comment ne pas perdre patience ?
Et puis la question essentielle…
Pourquoi ce phénomène est-il en expansion ?
Pourquoi de quelques cas il y a 50 ans passons nous maintenant à tant d’enfants en souffrance ?
Un des témoignages lus disait que les tda/h en grandissant étaient attirés par d’autres individus tda/h et engendraient des enfants eux-même symptomatiques. (L’hérédité étant établie scientifiquement)
C’est effrayant.
Cela veut-il dire que les capacités intellectuelles humaines s’affaiblissent ?
Est-ce un mal insidieux qui marque un tournant dans l’évolution ?
Cela a t’il un rapport avec le climat, les perturbateurs endocrinien, la technologie, les ondes… des théories qui fleurissent au grès des études et de la recherche.
Je vous laisse à cette réflexion.
Je n’ai pas de réponse.

Si vous voulez jeter un oeil aux témoignages, voici le lien pour le blog